Prenons un préjugé très répandu en France. « Plus il y a d’immigrés, plus il y a de délinquance ». John Paul Lepers, qui en est fermement convaincu, veut vérifier. À l’aide du recensement de l’INSEE et des statistiques du ministère de l’Intérieur, il se rend d’abord dans les communes de France qui comptent le plus d’immigrés : Aubervilliers, Beausoleil, Ferney-Voltaire, Oyonnax. Les écarts de délinquance dans ces quatre communes en tête du hit-parade de l’immigration sont tels qu’il doit changer de méthode. Il compare la délinquance dans deux grosses agglomérations que tout oppose : Montbéliard, à très fort taux d’immigrés et Caen, avec quasiment pas d’immigrés. Les résultats le stupéfient : ce sont les mêmes. Avec l'aide de statisticiens et de spécialistes de la criminalité, il démontre qu’il n’y a aucun lien entre immigration et délinquance.
Dans un second film, John Paul Lepers essaye de comprendre pourquoi lui, comme tant de monde, croit en ce préjugé. Il découvre des mécanismes insidieux qui sont à la racine de toute discrimination. À l’aide de professeurs en psychologie sociale, il réalise des expériences dans des écoles primaires et dans des salles de laboratoire qui révèlent les processus inconscients qui nous poussent à créer des catégories humaines et à apposer des stéréotypes, qui deviennent des préjugés à la base de toute discrimination.
Keyword - Racisme
mardi, novembre 25 2014
Immigration et délinquance : la fabrique du préjugé
vendredi, octobre 17 2014
Le football, objet du délire d’Éric Zemmour
Il n'est pas démontré que, mieux que tout autre, Éric Zemmour incarnerait l'immixtion des éditorialistes, des intellectuels médiatiques et autres penseurs consacrés par l'époque dans les affaires du football. Mais il fait peu de doutes qu'il a illustré avec une certaine constance l'instrumentalisation de ce dernier à des fins extérieures, l'hystérisation des débats au moindre incident et l'alimentation des nombreux psychodrames nationaux dont il aura été le prétexte depuis une petite vingtaine d'années. Pour lui comme pour la plupart de ses pairs, le football est devenu une obsession, à la fois symptôme de la décadence du pays et moyen de stigmatisation d'une partie de sa population.
Aussi n'y a-t-il pas grande surprise à constater que le football est un des fils rouges de son essai Le Suicide français, faisant l'objet de cinq passages substantiels. Comme annoncé dans l'introduction, l'auteur entend narrer "les quarante années qui ont défait la France", non seulement "président après président, loi après loi, élection après élection, intellectuel après intellectuel, (…)", mais aussi "match de football après match de football".
Le "roman national" d'Éric Zemmour est une fiction paranoïaque, son livre une mise en scène d'obsessions personnelles qu'il partage et a fait partager, grâce à la complaisance de nombreux médias, à une large frange de l'opinion française. La façon qu'il a d'y aborder le football est particulièrement symptomatique de cette France qui pratique la haine de soi.
lundi, mai 13 2013
Délinquance et immigration : des préjugés à l'analyse
Le propre de l’idéologie comme de la croyance religieuse, c’est de ne retenir de la réalité que ce qui confirme ses préjugés. Le propre de l’analyse scientifique comme de toute rigueur professionnelle, est au contraire de restituer la réalité dans toute sa complexité, quitte à modifier nos idées si celles-ci s’avèrent trop simples.
Depuis la fin du xixe siècle, le thème « délinquance et immigration » est au coeur des discours d’extrême droite. Mais il tend à se banaliser dans le débat public ces dernières années. L’argument couramment utilisé consiste à dire : « En prison, il y a surtout des Noirs et des Arabes », et à en déduire qu’il y a « quelque chose » (la culture, l’éducation, la religion...) qui relie la délinquance et l’immigration de façon substantielle. Voyons pourquoi c’est un bon exercice de réflexion sur les préjugés.
Spéciale dédicace à MM. Zemmour, Raufer, Bilger, Obertone et consorts.
- Lire cet article paru dans la revue L'Essor de la gendarmerie.
- Découvrir le dernier numéro de la revue canadienne Criminologie : "La criminalisation de l'immigration".
Photo : europe1.fr
vendredi, janvier 20 2012
Quel sens y a-t-il à parler de « génération d’immigrés » ?
François Cusset, dans un essai sur les années 1980 en France qu’il décrit comme « porté par une méfiance instinctive envers la notion de génération », dénonce le narcissisme démographique que trahit l’invocation de sa propre génération, pratique qu’il fait remonter au Musset de Confession d’un enfant du siècle (1834). On le sait : ce terme est très prisé des publicitaires et personnes publiques, de Jacques Séguéla (« Génération Mitterrand ») à Diam’s (« Génération nan-nan »), en passant par toutes sortes d’entreprises (Génération Piscine) ou publications (Génération Piercing). À travers ces exemples, des personnes voulant promouvoir un groupe démographique arborent fièrement ce qui tient au départ du simple hasard biologique.
La démarche est exactement inverse lorsque Xavier Darcos, alors ministre délégué à l’enseignement scolaire en 2003, avance que « ce qui a changé depuis 15 ans, c’est l’insolence des immigrés arabo-musulmans de la troisième génération, qui ont du mal à s’insérer dans le monde du travail et qui ont crié vive “Ben Laden” après le 11 Septembre ».
samedi, avril 16 2011
Racismes d’hier et d’aujourd’hui : dossier et ressources
Approches Cultures & Territoires (ACT) est une association à but non lucratif fondée en janvier 2005 à Marseille. Elle a pour objet « d’apporter outils, connaissances et expertises aux acteurs de l’éducation, de la culture, du travail social et plus largement à l’ensemble des citoyens concernés sur le territoire régional, par les problématiques de diversité culturelle, d’ethnicité et de discrimination ». Nous signalons ici le dossier mis en ligne par ACT : Apparemment la confusion règne aux « sommets » de l'Etat en ce qui concerne les questions de laïcité-islam, immigration-identité. Depuis plus de trente ans, à chaque échéance électorale les mêmes thèmes servent à brouiller les pistes en imposant au centre du débat le « problème de l’immigration ». Mais « On ne se baigne jamais deux fois dans la même rivière », aujourd’hui ce sont les représentants de l’Etat, avec en tête le président de la République, qui jouent avec le feu. A force de « jeux » politiques on a fini de se jouer du Politique. Aujourd’hui il n’y a plus d’instance de régulation, il n’y a quasiment plus d’arbitre pour siffler la fin de la récréation. Pour nous, il est nécessaire de rappeler les principes de base de la République.
dimanche, avril 10 2011
Corse et banlieues : ressemblances et (surtout) différences
« Violence, délinquance, remise en question de l’espace républicain, voire de l’identité nationale française, comme l'illustreraient les matches de football France-Algérie et Bastia-Lorient où La Marseillaise a été sifflée...
La Corse comme la banlieue ont en commun une image sulfureuse. Les médias notamment les présentent souvent sous un jour stigmatisant. Ce parallèle vous paraît-il éclairant ? Au-delà des représentations, quelles réalités partagées ? »
A la demande de la revue Fora ! La Corse vers le monde, nous avons répondu à une série de questions visant à comparer ces deux ensembles de territoires, quitte à conclure que les différences sont clairement plus nombreuses que les ressemblances.
- Lire l'intégralité de cet entretien sur le site de la revue Fora ! La Corse vers le monde.
Illustration : twiga269 ॐ FreeTIBET - flickr - licence cc
mercredi, mars 9 2011
Les trois moteurs de la menace Le Pen (au-delà d'un pseudo sondage)
Deux précautions valent mieux qu'une. Le sondage qui a défrayé la chronique durant le week-end en plaçant Marine Le Pen, la présidente du Front national, en tête des intentions de vote au premier tour de l'élection présidentielle est contestable. Les modalités de cette enquête, réalisée par l'institut Harris Interactive, prêtent à l'évidence le flanc à la critique, comme cela est parfaitement expliqué par ailleurs. Seconde précaution : on ne répétera jamais assez qu'à quatorze mois d'un scrutin, alors que candidats et programmes ne sont pas encore connus, les sondages d'intention de vote relèvent, pour une bonne part, de la politique virtuelle. Ils évaluent des popularités, esquissent des tendances, explorent des attentes. Mais, comme le démontrent tous les scrutins antérieurs, ils ne sont en aucun cas prédictifs du résultat de 2012.
Ces réserves faites, il n'en serait pas moins imprudent ou naïf de se voiler la face : la présidente du Front national a indéniablement bousculé la scène politique depuis le début de l'année et elle constitue désormais une menace sérieuse, aussi bien pour la droite que pour la gauche.
- Lire la suite de cette chronique de Gérard Courtois dans Le Monde.
- Lire la tribune de Jacques Le Bohec (Université Lyon 2) : "Sondage : Marine Le Pen à 23% au premier tour ? Peu probable" (Rue 89).
- Voir un sondage donnant des résultats différents.
- Voir les critiques de l'observatoire des sondages sur ces pseudo sondages par Internet.
jeudi, septembre 30 2010
"La cité du mâle", quelle nullité !
Les médias avaient fait tellement de bruit (il faut dire du "buzz" aujourd'hui...) autour de ce film et de la déprogrammation de sa première diffusion, que nous nous sommes sentis obligé de regarder ce film. Et puis c'était sur ARTE, la "chaîne culturelle", la "chaîne des intellos", le must du must. Quelle désillusion ! Quelle nullité ! Quelle supercherie. Le degré zéro du journalisme. Un sujet racoleur, un parti-pris constant qui est le contraire de la neutralité, une démarche moralisatrice et dénonciatrice de bout en bout, un montage facile d'une demi-douzaine de "paumés" des quartiers, certains à moitié illettrés, d'autres à peine pubères, à qui on demande de jouer les hommes, les vrais, et de débiter devant la caméra leurs préjugés ordinaires sur l'ordre des choses et la place des femmes. Le scénario était écrit d'avance, il fallait juste trouver les acteurs et leur faire jouer le rôle.